La frontière de Khorgos est une des frontières les plus marquées (et des plus marquantes!) que nous avons traversées depuis le début du voyage, les frontières de l'Iran arrivant en deuxième position. Après avoir slalomé entre les immeubles délabrés (fil « rouge » des différentes frontières des anciens pays du bloc soviétique, blague à part) pour enfin effectuer les formalités de sortie du Kazakhstan, nous franchissons pas moins de 7km de no man's land sur une route encadrée de barrières barbelées de 3m de haut et avec une caméra tous les 10m (un peu parano les chinois?). Nous arrivons enfin devant le bâtiment flambant neuf de la douane chinoise : la porte de l'Empire du Milieu !
Avec les retours que nous avons pu avoir nous savons que notre entrée sur le territoire chinois peut prendre quelque temps : scans voire fouilles des bagages, vérification du contenu de nos téléphones, longueur des formalités... Finalement tout se passera avec une déconcertante facilité : nous sommes presque seuls, on nous accueille avec le sourire, on nous passe au scanner (oui oui), nous aide à remplir le formulaire d'entrée sur le territoire, les bagages ne sont pas fouillés et le fonctionnaire en service ne fera que regarder rapidement les quelques photos de mon téléphone alors qu'à d'autre postes frontières ils installent carrément un logiciel espion sur le smartphone des étrangers entrant sur le territoire (j'avais tout de même enlevé ma carte SD pour éviter qu'ils ne passe en revu tout notre voyage...).
Seul soucis notable : le nom de Clarisse était trop long pour leur logiciel, ce qui a pris bien 15 min et l'intervention de 3 personnes pour être résolu ! Bon par contre on sent bien qu'on rentre au pays de big brother : photos, prises d'empreintes des deux mains... nous sommes clairement fichés !
Une dernière grille s'ouvre : nous voilà en Chine ! Nous sommes le 10 Septembre, un jour avant la fin de validité de notre visa (nous avions 90 jours pour nous rendre en Chine depuis l'obtention du visa à Téhéran) !
Ce qui est incroyable avec cette frontière c'est qu'on débarque directement en pleine ville ! Nous avions bien vu les immeubles depuis le no man's land mais nous n'imaginions pas qu'à peine la frontière passée nous serions instantanément propulsés dans une ville moderne et organisée. Cette frontière attire d'ailleurs des touristes chinois qui viennent la prendre en photo ainsi que les « nouveaux arrivants », c'est vraiment une drôle d'atmosphère (alors que côté kazakh mon père n'a même pas pu nous prendre en photo alors que nous étions au 1er checkpoint à 5km de la frontière...).
Quel changement avec l'autre côté du grillage et le village décrépi avant la frontière ! C'est un peu comme si on était passé d'un bled de l'atlas marocain au centre ville de Genève : bitume impeccable, voitures neuves et non polluantes, feux tricolores, trottoirs, scooters électriques, passages sous-terrain pour traverser les avenues, magasins propres et rangés, et quasiment aucun coup de klaxon... On est loin du bordel ambiant de l'Asie Centrale post-soviétique auquel nous nous sommes habitués. Outre cette téléportation dans la modernité, qui, il faut le dire, ne nous déplaît pas, nous sommes surtout entrés dans un pays sérieusement policé, et dans une région, le Xinjiang, carrément verrouillée par les forces de l'ordre.
Depuis les revendications d'indépendance de la minorité musulmane de cette région, les Ouïgours, qui ont donné lieu à quelques attentats contre le gouvernement chinois, la population est sous constante surveillance. Barrières haute-sécurité devant tous les bâtiments, policiers en armes à tous les coins de rue, caméras omniprésentes, gares et gares routières sécurisées comme des bunkers : contrôle d'identité, scan des bagages... La ville pourrait tenir l'attaque d'une armée.
Nous étions au courant de la situation et avons donc décidé de traverser la région en transport en commun pour nous rendre rapidement dans un coin plus propice au voyage à vélo. D'autres cyclistes ont fait le choix de traverser le Xinjiang, avec plus ou moins de facilité, sachant qu'il est interdit de camper, que la plupart des hôtels refusent les étrangers, que pas mal de routes sont interdites aux étrangers : donc souvent obligés de rester sur l'autoroute, que les contacts avec la population locale est très limitée car cela peut leur créer de sérieux problèmes... Les anecdotes qu'ils nous font parvenir nous donnent une idée de leur expérience : camper dans les canaux d'évacuation d'eau sous l'autoroute, se faire payer l'hôtel par la police qui était venue les déloger de leur bivouac, se faire transporter par la police de l'entrée à la sortie d'une ville, se faire déloger d'un hôtel en pleine nuit car interdit aux étrangers, se faire escorter par la police sur plus de 100 km, impossibilité d'acheter du gaz ou de l'essence pour le réchaud... Faisable donc, et la police reste très courtoise, mais de notre côté nous avons préféré garder nos précieux jours autorisés sur le territoire (60... c'est court pour un si grand pays !) pour des régions plus accueillantes.
Nous prenons donc le bus de Khorgos à Urumqi, la capitale du Xinjiang. Nous passons l'après-midi dans la gare routière car nous avons eu la bonne idée de nous y rendre avec le vélo pour acheter nos billets... une fois les contrôles passés nous n'avions plus vraiment la foi de ressortir !
Après négociation avec le chauffeur du bus (et démonstration par A+B que ça passe) nous arrivons à mettre Georges debout en travers de la soute sans le démonter. C'est un bus couchettes. On enlève nos chaussures pour monter dans le bus, et on s'allonge sur sa couchette... à taille chinoise : mieux vaut ne pas être trop grand ! Et impossible de se tenir assis sans se cogner la tête. Bon ça reste tout de même assez confortable et cela permet de dormir correctement... Oui enfin ça s'était sans compter qu'au Xinjiang il y a des checkpoints réguliers sur l'autoroute : tout le monde doit descendre du bus pour passer le détecteur de métaux et le contrôle d'identité automatique avec reconnaissance faciale entre le visage de la personne et la photo d'identité... Si Georges Orwell voyait ça...
C'est vraiment flippant de voir comment un état trop sécuritaire peut devenir liberticide, car oui la justification de tout cela est la sécurité de la population ! C'est simple, tout un chacun est considéré comme un terroriste potentiel : les briquets sont systématiquement confisqués aux checkpoints, et ne parlons même pas d'avoir un couteau sur soi... Il paraît que de nombreux Ouïghours ont disparus, certains mentionnent des camps... Nous en savons peu mais de nombreuses zones sont totalement interdites aux étrangers, ce qui laisse place à la libre interprétation.
Après 600km d'autoroute et un dernier checkpoint à l'entrée de la ville, nous arrivons à Urumqi dans la matinée. A partir de là nous prendrons le train pour Xining, dans la région du Qinghaï, à plus de 1500km à l'est. Notre première mission de la journée est de nous rendre à la gare pour récupérer nos billets de train et expédier Georges et Bob par la compagnie de transport ferroviaire : en Chine on ne peut emmener son vélo dans le train que s'il est plié ou démonté dans un sac, sinon il faut l'envoyer en fret. Entrer dans la gare est un véritable casse-tête (chinois) avec tous les contrôles et checkpoints à franchir... heureusement Clarisse est restée avec le tandem à l'extérieur, ça va plus vite sans bagages. Billets en poche, nous nous rendons au bout de la ruelle où se situe la société de fret ferroviaire. Nous ne sommes pas hyper rassurés de laisser le tandem transiter seul sur une aussi longue distance mais Laura et Benoît l'ont fait avec leurs vélos avant nous et tout s'est bien passé. Ils nous avaient d'ailleurs prévenus que le personnel est très pointilleux sur le contenu des affaires expédiées et qu'ils vérifiaient tout. Sont interdits : les briquets, les ciseaux, les couteaux, les solvants (comme la colle pour rustines, plutôt utile lorsqu'on voyage à vélo...), voire toute substance qu'ils trouvent louche : huiles alimentaires, huiles essentielles... Nous avions donc caché certaines chosent dans notre thermos et dans nos duvets (peut être les 2 seuls trucs qu'ils n'ont pas ouvert... ) et l'opinel sous la selle du vélo. Le fret est très bien organisé : les bagages sont mis dans des sacs de joute qui sont sellés par une couture sur le moment. Nous gardons nos deux sacoches de vêtements mais expédions tout le reste, petit pincement d'abandonner nos fidèles compagnons ici.
Deuxième mission du jour : trouver un hôtel car notre train n'est que le lendemain. Mais avant : nous avons faim ! C'est là où tout de suite nous apprécions le pays : il y a de quoi manger partout ! Nous empruntons une rue où les échoppes et autres mini-restaurants se suivent et se ressemblent... il y a l'embarras de choix. Nous engloutissons notre première délicieuse assiette de nouilles chinoises, nous sommes ravis.
Vu que tous les hôtels n'acceptent pas les étrangers j'ai réservé une chambre sur Booking afin de ne pas avoir à courir la ville à la recherche d'un hôtel nous acceptant (en général les plus chers bien sûr). Finalement le prix sur place ne correspondant pas à ce qui était écrit sur le site, nous partons à la recherche d'une auberge de jeunesse qu'on nous a recommandée. C'est assez loin ce qui nous permet de voir une partie de la ville, qui est tout autant sécurisée que Khorgos. Même pour rentrer dans un parc il faut montrer sa pièce d'identité et passer son sac au scanner... quelle vie pour les habitants.
Urumqi est une ville de taille moyenne pour le pays (à peine 3.5 millions d'habitants...) où nous pouvons constater la modernité de la Chine par rapport aux pays précédents sur notre route : gratte-ciels, larges boulevards périphériques, grands shopping-malls... Heureusement d'agréables et grands parcs lui apportent une large touche de verdure. C'est notre première grande ville depuis Téhéran, ambiance radicalement différente de notre vécu des 3 derniers mois passés plutôt dans la nature et les petits villages ! Nous avons tellement changé de monde qu'il nous est difficile de nous dire qu'il y a à peine 24h nous laissions mon père devant ce poste frontière délabré des confins du monde russophone.
Faute de place dans les trains « classiques » en couchette et n'ayant pas vraiment envie de faire 20h de trajet assis, c'est par le TGV que nous traverserons une grande partie du pays. La gare flambant neuve d'où partent les trains rapides ressemble à un véritable terminal d'aéroport. Les trains en partance ont leur « gate » qu'on ne peut pas franchir avant l'heure où le « check in » ouvre. Les chinois boivent du thé en permanence ou même tout simplement de l'eau chaud (ce qui nous surprend au début dans les restaurants), on trouve alors partout des distributeurs d'eau bouillie, la gare et le train ne font pas exception. Le train est bondé (« c'est la Chine dans le ce train », si je peux me permettre) , les chinois se déplacent beaucoup dans leur pays. Les rangées comptent cinq sièges contre quatre chez nous, une hôtesse passe régulièrement pour proposer des boissons (enfin c'est ce qu'on imagine... elle ne parle que chinois) et il y a des prises électriques : parfait pour rédiger le blog ! Nous avons tout de même 10h de train à tuer.
C'est à plus de 200km/h (record de vitesse de déplacement depuis notre départ de France !) que nous traversons les vignes du Xinjiang, suivies du désert du Taklamakan et ses éoliennes à perte de vue, puis continuons à travers le paysage austère du sud du désert de Gobi avant de bifurquer au Sud-Est à travers des massifs montagneux où la ligne de train enchaîne les tunnels mais nous laisse apercevoir d'impressionnantes vallées encaissées. Tant de paysages qui défilent à toute vitesse sous nos yeux, ce que nous évitons habituellement par la lenteur du voyage à vélo mais nous sommes heureux d'avoir évité la partie du pays à la fois la plus désertique et la plus sécuritaire.
Après un agréable trajet nous débarquons donc à Xining à 2200m d'altitude. Pourquoi avoir choisi cette destination ? (ben oui je vous le demande ! Il y a pas mal de choix en terme de villes dans ce pays...). La région du Qinghaï dont Xining est la « capitale » correspond à la région du Tibet historique nommée Amdo. Le Tibet est malheureusement désormais impossible d'accès à vélo pour les étrangers (encore plus fermé que le Xinjiang) et j'avais pu lire sur des blogs que les cyclo-touristes voulant découvrir la culture tibétaine se rabattait sur cette région, nous avons fait de même.
Nous pensions voir des tibétains, mais à notre grand étonnement ce sont surtout des chinois musulmans avec leur petit calot blanc que nous voyons. Une bonne partie de la ville est peuplée par la minorité Hui. Elle ne compte pas moins de 80 mosquées, dont la plus grande du pays. Certaines sont cernées par des grattes-ciels, comme noyées dans cette marée de béton. Nous qui pensions avoir quitté le monde musulman, ce ne sera pas pour tout de suite. Nous croisons quand même quelques personnes nous paraissant plutôt typées tibétaines et quelques moines bouddhistes dans leur habituelle toge rouge. Le mix culturel de la ville est d'autant plus intéressant. Peu voir pas d'Occidentaux dans ce coin, on nous dévisage, surtout Clarisse et ses cheveux frisés qui interpellent les passants. Les regards sont insistants mais ils n'ont pas le côté "malsain" que Clarisse a pu parfois ressentir en Asie Centrale, plus de curiosité que de voyeurisme dans les yeux des chinois.
Les genoux de Clarisse ont besoin de repos, nous avons donc prévu une semaine complète de pause sans pédalage, nous voulons en profiter pour faire un saut à Xi'an, ancienne capitale de la Chine et considérée comme le point d'arrivée de la route de la soie. La ville est surtout connue de nos jours pour les milliers de soldats à taille humaine de son armée de terre-cuite. Ca sera mon cadeau d'anniversaire, trente-cinq ans ça se fête !
La compagnie de fret nous avait annoncé un délai de 48h pour que le vélo soit livré, nous espérions alors pouvoir récupérer le tandem et le laisser dans une auberge de jeunesse le temps de notre excursion touristique. A la mi-journée il n'est pas encore arrivé et nous décidons finalement de nous rendre à Xi'an le jour même, le service de fret nous confirme qu'ils gardent les biens pendant trois jours sans frais, on sera revenu à temps. Avec tout de même quelques inquiétudes de ne pas avoir de nouvelles de nos affaires pendant encore trois jours, nous repartons acheter deux billets de train (TGV une fois encore... autant ne pas perdre de temps) pour la fin de journée. Nous avions contacté une personne sur Warmshowers et qui nous a épondu positivement pour nous héberger durant notre séjour, ça ne lui pose pas de problème que nous arrivions le jour même. C'est génial car nous allons rencontrer une chinoise parlant anglais dès le début du séjour, nous avons déjà plein de questions et nous allons donc pouvoir apprendre beaucoup de choses sur la vie en Chine avant de la parcourir à vélo.
Après un déjeuné composé de momos, sorte de beignets fourrés de viande ou de légumes et cuit à la vapeur, nous voilà reparti pour 600 km de train plein Est ! Nouvelle traversée de superbes paysages de montagnes avec cultures en terrasses et leur lot de tunnels. Cette voie ferrée (ouverte il y a à peine quelques années) a demandé un travail titanesque. Nous longeons de nombreuses villes qui ont chacune leur lot de grues et de barres d'immeubles en construction, on sent que le pays prévoit de quoi loger sa population grandissante.
21h nous débarquons à Xi'an, et nous prenons le métro pour retrouver Ning. Premier métro depuis Téhéran ! Il est tout neuf et très propre, nous sommes loin du métro parisien.
Ning a grandi à Xi'an mais est partie à 18 ans pour faire ses études au Canada, où elle a vécu 13 ans. Elle n'est rentré que depuis le mois de Juillet sous la pression paternelle. Elle est de la génération où la politique de l'enfant unique faisait loi, elle est donc la seule fille de ses parents et se doit donc de respecter leur demande. La Chine reste un pays très traditionnel et le père de Ning aimerait bien la voir mariée mais elle nous confie qu'à 30 ans, elle est presque déjà trop âgée pour les jeunes hommes chinois qui rêvent de progéniture. Malgré tout elle garde en tête de retourner au Canada et elle a donc conservé sa maison où elle a laissé toutes ses affaires... et du coup sa mère y séjourne actuellement pour s'en occuper, drôle de situation. Avec la culture occidentale qu'elle a acquise au fil des années, elle a un regard critique sur la société chinoise, c'est un plaisir pour nous d'en discuter avec elle. Nous aborderons notamment le sujet de la vie active en Chine. Elle nous dit que chinois travaillent comme des acharnés : les horaires de travail sont longs, ils n'ont en général pas le temps de se faire à manger, ils travaillent souvent 6 jours par semaine et les congés payés sont très récents (5 jours par an, puis 10 jours après 10 ans d'ancienneté) avant cela seules les vacances nationales – 2 semaines par an – existaient. La Chine vit une véritable fuite en avant due à la compétition interpersonnelle existant dans ce pays si peuplé. La pression commence d'ailleurs dès le plus jeune âge, il est habituel (dans les villes en tout cas) que les enfants aient des cours du soir dès leur plus jeune âge, ils commencent les cours particuliers d'anglais dès 3 ans, à 10 ans il n'est pas rare qu'ils doivent étudier jusque 22 heures. Nous pouvons nous estimer heureux avec nos semaines d'école et nos 35h.
Ning a pu trouver une place dans une société publique (celle où son père travaille), c'est à priori un cadre plus agréable que les sociétés privées car, malgré des salaires plus bas, les salariés ont des avantages en nature qui vont jusqu'à être logé ou ne pas payer la nourriture.
Par ailleurs, elle nous confirmera qu'il est obligatoire en ville d'avoir un véhicule récent répondant aux dernières normes anti-pollution, heureusement car de plus en plus de chinois veulent avoir un véhicule personnel (pour s'en servir très peu au final nous dira-t-elle). Mais avant de pouvoir espérer circuler dans leur SUV dont certains imitent sans honte les marques occidentales (comme le « Leopard », copie du Porsche Cayenne ou encore le « Land Wind », pour Land Rover) ils devront parfois attendre longtemps car les plaques d'immatriculation sont assignées par tirage au sort !
Nous sommes vendredi, Ning travaille, nous en profitons donc pour aller voir l'armée de terre cuite qui est située à 40 km de la ville. Nous prenons un bus devant la gare centrale de la ville qui est située juste à l'extérieur des remparts qui démarquent l'ancienne cité. Une partie a été reconstruite et on peut désormais faire le tour des remparts à pieds ou en vélo (le tour fait 14 km tout de même) . L'armée de terre cuite est un des lieux les plus touristiques de Chine, nous ne sommes pas dans la haute période tant mieux car, lorsqu'on voit la taille du bâtiment de billetterie, on peut imaginer le monde qu'il peut y avoir. Le site se compose de trois « fosses » où on été excavés les fameux soldats et animaux, il y en plus de 2000 de visibles mais il est estimé qu'il y en aurait 6000. Outre les rangées de centaines de statues tournées vers l'Est, on peut aussi apercevoir quelques parties de « corps » pas encore extraites du sol : ici une main, là un visage, ici encore un pied... Le travail de fouille est toujours en cours sur le site, on peut même voir des soldats en cours de reconstruction, car bien sûr ils ont été totalement brisés par le temps, les reconstituer est un véritable puzzle qui nécessite de 6 mois à 3 ans par statue ! Cette armée date de plus de 2000 ans et était là pour protéger le mausolée de l'Empereur Qin Shing Huang situé 2 km plus à l'ouest (c'est aussi lui qui est à l'origine de la grande muraille de Chine).
Nous sommes vraiment heureux et impressionnés d'avoir pu contempler cette incroyable trésor de l'histoire chinoise, une des plus importantes découvertes archéologiques des dernières décennies. Découverte d'ailleurs totalement fortuite puisque ce sont des paysans en 1974 qui ont ouverts une cavité contenant des centaines de statues alors qu'ils creusaient un puit. Le sol appartenant à l'état, ils n'ont absolument rien reçu pour les remercier de leur extraordinaire découverte. Dès 1979 le site est ouvert au touristes, un immense hangar a été construit au dessus des fosses pour les préserver.
De retour à Xi'an nous flânons un peu dans la ville et en profitons pour faire une petite visite à notre magasin de sport favori : Décathlon ! Nous voulons acheter deux-trois choses et au moins nous sommes sûrs de leur qualité, de toute façon la plupart des produits sont « made in china » alors c'est presque acheter local. Drôle, le magasin est tout à fait identique aux magasins que nous connaissons et les vidéos promotionnelles des produits sont en français, sous-titrées en mandarin. Un vrai saut en France. Au détour d'un parc, nous tombons sur des personnes dansant, certains seuls, d'autres en couple. Les Chinois aiment danser et dans toutes les villes on peut voir des regroupement d'amateurs autour d'un professeur et d'une sono.
Nous expérimentons le métro à l'heure de pointe (« C'est la Chine dans le métro ! ») ce qui nous permet de réaliser à quel point il peut y avoir du monde dans cette ville (Xi'an compte 8 millions d'habitants tout de même) mais aussi que les chinois sont très bien organisés pour gérer l'afflux de personnes : des barrières amovibles sont installées pour canaliser le flux de passagers voulant atteindre ou quitter les quais, les flux ne se croisent pas ce qui évitent la pagaille (que l'on peut connaître dans notre chère capitale).
Nous retrouvons Ning qui nous amène dîner dans un excellent restaurant végétarien ou des plats ingénieux à base de tofu offrent des saveurs pouvant aller jusqu'à imiter la viande, un régal ! Ensuite elle nous emmène voir le magnifique spectacle des fontaines musicales devant la grande Pagode de l'Oie Sauvage et nous finissons la soirée en parcourant une longue avenue piétonne moderne où le tout Xi'an aime venir se balader en soirée. Nous sommes dans l'ambiance de la ville telle que les chinois la vive.
Ning commande un taxi sur une application mobile, la Chine aussi à son Uber (il en est même devenu difficile de trouver un taxi dans la rue le soir nous dira-t-elle). La plupart des applications ou sites web américains que nous connaissons en Europe sont interdits (en particulier ceux émanant de Google ou Facebook), et ont donc leur remplaçant chinois. Baidumap remplace Googlemap, WeChat remplace Whatsapp... Nous découvrons d'ailleurs avec Ning que WeChat est bien plus qu'une application de discussion, on peut tout faire avec (ou presque) et notamment payer ses achats. Elle nous explique que la Chine est directement passé de la monnaie liquide au paiement par QR code via son smartphone sans passer par la case carte de crédit ou presque. Dans le pays, on peut quasiment tout payer par QR code, même les restaurants des bleds perdus ou les vendeurs ambulants de rue ont un QR code que l'on scanne pour les payer : en général l'argent passe d'un compte WeChat à un autre ! Les milliers de vélos en libre service dans la ville peuvent aussi être utilisé en scannant le code qui est dessus (il y a tellement de vélos dans la ville qu'on en trouve littéralement des tas)... Est-ce le futur ? On nous dira plus tard que WeChat est géré par le gouvernement et qu'avoir développé ce moyen numérique de paiement permet de contrôler ce que chacun fait... ce ne serait guère surprenant.
Samedi pluvieux, Ning nous emmène visiter le quartier musulman de la ville, où les échoppes vendant des spécialités culinaires se suivent à n'en plus finir. On pourrait y passer la journée à grignoter autant du poulpe grillé que des sucreries diverses. De manière générale, nous avons remarqué qu'en Chine ce n'est jamais un problème pour trouver à manger, on a un peu l'impression qu'il n'y a que ça partout !
Le quartier est très animé ,et sans la pluie Ning nous dit que ce serait carrément invivable tellement il y a de monde le week-end. Après cette balade dans un quartier « populaire », elle nous emmène faire un tour dans un immense centre commercial que les jeunes de la ville fréquentent. Une fois à l'intérieur, nous restons bouche bée, la galerie fait bien 10 étages et des escalators s'entrecroisant gravissent les étages. C'est l'heure de pointe en ce samedi soir, ça grouille dans tous les sens, il y a vraiment du monde dans ce pays (« C'est la Chine dans ce centre commercial ! », ok c'est bon j'arrête). Nous contemplons ce spectacle de la modernité en nous rappelant ce que nous avons vu ces derniers mois... nous continuons de prendre une claque !
Après une dernière soirée bien sympathique en compagnie de notre hôte durant laquelle nous lui posons encore milles questions sur son pays, nous repartons pour Xining. La pause touristique est terminée, il est tant de retrouver nos chers compagnons et de reprendre la route. Nous reprenons donc le TGV et filons directement chercher Georges et Bob. Nous sommes impatients de les retrouver et d'être enfin rassurés. Nous donnons notre papier et nous attendons 5 min puis la personne arrive avec nos 5 « colis », tout est là, youpi ! Nous inspectons Georges, il s'en tire avec quelques nouvelles rayures et le « pouet » de Clarisse est cassé, rien de bien grave. Même l'opinel caché sous la selle est toujours là. Nous réinstallons nos sacoches et nous quittons la gare direction l'auberge de jeunesse où nous étions déjà avant notre excursion, bien que les salles de bains soient vraiment très sales, le personnel est sympa et les chambres agréables. Par contre c'est au 5e étage donc pas simple pour le vélo mais on arrivera à le monter sur une sorte de terrasse où il n'est pas à la vue de tous. Dernière soirée à Xining, je teste les mian pian, plat de pâtes carrées, classique de la région.
C'est sous la grisaille que nous reprenons le vélo. A peine arriver au coin de la rue le compteur passe les 9000 km. Ce nouveau départ marque le grand changement de direction de notre itinéraire, depuis 6 mois nous voyagions vers l'Est, désormais ce sera cap au Sud !
Un point non évoqué précédemment est la réelle barrière de la langue que l'on vit en Chine. Nous n'avons rencontré quasiment personne ne parlant anglais et si nous ne choisissons pas un restaurant avec le menu en images, il nous est bien difficile de commander exactement ce qu'on veut ! Jusque-là nous avions toujours réussi à nous faire comprendre en parlant avec les mains ou en mimant (avec plus ou moins de facilité) mais depuis notre entrée en Chine c'est plus compliqué, nous avons des codes très différents avec les chinois ! D'ailleurs ils comptent jusqu'à dix avec une seule main, il nous a donc été indispensable de connaître les signes pour les chiffres de 5 à 10 (merci Ning!). Ils ont aussi des gestes différents pour « mimer » les différentes nouilles (par exemple pour les mian pian c'est un peu comme distribuer de cartes, pour les nouilles longues comme jouer de l'accordéon ). Mais heureusement la technologie est là pour nous aider et il existe de très bonnes applications de traduction anglais-madarin (Baidu translate, youdao...), qui nous permettent de nous débrouiller voire même de discuter. Ces deux mois en Chine nous réservent en tout cas bien des péripéties de compréhension... nous verrons bien !
Toutes les photos de ces premières semaines en Chine ici
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